Peter Pelchat

Peter Pelchat

Peter Pelchat est né en 1968 d’un père québécois et d’une mère crie. Il vit et travaille à Chisasibi où il enseigne depuis 2003. Bachelier en arts visuels de l’Université Concordia, il élabore à travers sa démarche une remarquable synthèse des éléments tirés de ses études en histoire en de l’art ainsi que de sa connaissance des grands courants de l’art contemporain et de ceux venus de l’étroite relation qu’il maintient avec tous les aspects de sa culture d’origine.

Très attaché à son territoire et à la préservation de son écologie, il poursuit une œuvre enracinée. Il ne craint pas de s’y exprimer, parfois avec humour, parfois avec véhémence mais toujours sans complaisance, sur les questions territoriales, sociales et culturelles auxquelles doit faire face la nation crie.

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Children at her Feet (Enfants à ses pieds)

Peter Pelchat, 2004
Médias mixtes, 11 x 15″

Portrait de ma grand-mère. Je la compare à ces femmes des anciens et célèbres peintures «madone et enfant» et «mère et enfants» produits aux 15ième et au 16ième siècles.

Children at her feet

« Le titre provient d’une chanson des Beatles, Lady Madonna.
Il s’agit d’un portrait de ma grand-mère. On dit qu’elle a fait beaucoup de bien pour ses enfants et ses petits-enfants. Ici je la compare à des tableaux célèbres de la «Madonne à l’enfant», un des sujets de prédilection pour les artistes de premier plan dans le passé. Si j’ai choisi ce tableau de Parmagianino, c’est parce que la Madone de ce tableau-là a un autre aspect que l’interprétation chez la plupart des artistes. Elle est spéciale, toute comme ma grand-mère. Selon ma mère et tous ceux qui ont connu ma grand-mère, elle était une femme tout à fait spéciale. »

P. Pelchat

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Chisasibi under a low sky (Chisasibi sous un ciel sombre)

Peter Pelchat, 2001
Aquarelle, 12 x 15″

Une scène typique de mon village Chisasibi, Québec. Un tipi est entouré de maison sous un ciel nuageux.

Chisasibi under a low sky

« Toutes les maisons de Chisasibi se ressemblent, ainsi, dépeindre ce village pose tout un défi. Ici je voulais tout simplement capter le silence que j’y ai perçu ce matin-là, près de la maison de ma mère. Le ciel sombre est un « présage » de quelque chose qui arrivera, mais quoi ? Un jugement, peut-être… »

P. Pelchat

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Crisis (Crise)

Peter Pelchat, 2003
Médias mixtes, 15 x 20″

Autoportrait avec petit drapeau canadien. Un regard sur mon identité en tant que métis (Canadien français et Cri) Je voulais montrer où je suis situé à l’intérieur de ces deux Races/cultures. Je me sens perdu quelques fois, mais je suis certain que je suis Canadien.

Crisis

« Le thème de ce tableau/collage est mon identité, ou la découverte de mon identité. J’ai mis plusieurs années à découvrir qui je suis. Est-ce que j’étais un Cri, un Blanc ou un entre-deux ? J’ai découvert que j’étais vraiment Métis au coeur. Ce tableau représente ce que je suis. On peut le diviser en trois parties, de gauche à droite. Le côté gauche démontre que je ne suis pas Autochtone (par les trois danseurs autochtones barrés d’un x). Le mot Nimwii(qui signifie non sur un rectangle rouge signifie que je ne suis pas Autochtone. Tout ce qui me marque comme un Autochtone, c’est le symbole de l’oie dans le coin gauche supérieur avec trois lignes verticales qui représentent le numéro trois, ou le nombre d’oies que j’avais tués au moment où j’ai peint ce tableau.
Le milieu du tableau dépeint ma façon de me voir : le drapeau signifie ma certitude d’être Canadien. La boussole est un symbole de mon goût de l’aventure et de la découverte.
L’écorce, que j’y ai collée, symbolise mes racines fortes, mon appréciation de ma culture et de la tradition.
Le côté droit du tableau démontre que je ne suis pas un homme blanc : le mot not (pas) écrit sur un boz blanc souligne ce fait. Le Pac-Man qui mange les points vers le haut signifie mon attitude à l’égard de l’homme blanc : il consomme ou exploite tout ce qui se trouve sur son chemin. La constellation de la Grande Ourse dessinée à l’envers est un exemple de mon intérêt pour les sciences de l’homme blanc : si j’ai dessiné la Grande Ourse à l’envers, c’est pour dire aux spectateurs que les sciences n’ont pas toutes les réponses dans la vie.
Le fond signifie l’union de mon côté autochtone (couleur brunâtre) et de mon côté blanc (couleur rosâtre). Ces côtés sont réunis par un fil que j’ai cousu à même le papier. La ligne noire fine entre ces deux couleurs signifie mon passé et les moments sombres où je me sentais perdu, dépourvu d’un sens de mon identité. »

P. Pelchat

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Dark cloud, red cloud (Nuages noir, nuage rouge)

Peter Pelchat, 2006
Aquarelle et acrylique sur carton, 15 x 20″

Cette oeuvre parle du brusque bombardement de technologie subi par le Cris dans les années 1970 et 80. La construction des barrages d’Hydro Québec a amené une route qui va vers le sud. Cela a apporté des technologies auquelles nous n’étions pas préparés. Nous avons perdu notre façon de vivre traditionnelle à cause des automobiles, des moto-neiges, des systèmes de son stéréo, des ordinateurs et autres technologies. Le contrôleur de jeu vidéo au dessus de la tête du célèbre chef indien Nuage Rouge représente un nuage noir qui le place dans l’ombre de la vie. Nous sommes à la merci de la technologie. Le radio-télescope à gauche symbolise la recherche d’une nouvelle identité.

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Generations of bingo players (Generations de joueurs de bingo)

Peter Pelchat, 2002
Médias mixtes/collage sur papier, 30 x 40″

Ce tableau fait partie d’une série de huit oeuvres. C’est une façon légère de voir combien les Cris sont intéressés par le jeu de bingo. La grand-mère et son petit enfant symbolisent les gens qui jouent au bingo. Dans cette oeuvre, il semble que le bingo est plus important que la chasse, la pêche et la religion. Néanmoins, ils sont protégés par le manteau du chef au centre duquel ils sont représentés. Cela veut dire que la culture et la tradition sont vivantes et se portent bien.

Generations of bingo players

« Ce tableau est une juxtaposition inouïe de l’amour, de la protection et du jeu du Bingo (le jeu préféré ici à Chisasibi). L’amour et la protection que donne la femme à son enfant sont encadrés par un manteau de chef (symbole de la puissance et de la protection), ce qui signifie que les Cris et leur culture, leurs traditions, sont en sécurité. Les trois cartes de bingo sous la femme et l’enfant signifie que le jeu du bingo et les besoins matériels n’ont pas tant d’importance chez les Cris, tandis que les oies, le poisson et la croix symbolisent leur culture et leur tradition. Bref, les Cris aiment bien jouer au bingo, mais sans oublier leur identité propre. »

P. Pelchat

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This is me (C’est moi)

Peter Pelchat, 2002
Médias mixtes/collage sur papier, 3 x 4′

C’est encore un autoportrait parlant de mon conflit identitaire. La répétition de ma carte d’Indien statué symbolise qui je suis vis-à-vis du gouvernement. Parfois je sens que sans cette carte, je n’aurais pas d’identité. Cette carte nous sépare, les miens et moi, du reste de la population de notre pays. Je pense que cette carte ne fait que confirmer que nous sommes différents, affermissant l’image de «l’Indien d’Hollywood» ou de «l’Indien de John Wayne». La main symbolise le temps et la vie. Les lignes verticales symbolisent le sentiment que j’ai d’être prisonnier de cette identité et de cette carte.

This is me

« Ici, je récuse l’attitude du gouvernement à l’égard des Autochtones. Nous détenons une carte de statut autochtone pour signaler au monde entier que nous sommes effectivement des Autochtones. On nous attribue un numéro et une photo — je me sens comme un truand quand je regarde ma carte. Je me sens comme en prison (ce que symbolisent les rayures verticales en bas et mes empreintes digitales plus haut). Ma carte de statut autochtone me rappelle une fiche anthropométrique. Pourquoi avons-nous besoin d’une carte pour rappeler à nous et aux autres ce que nous sommes ? On dirait que sans cette carte, je cesserais d’exister. Les contours de mes mains signifient ce que je suis vraiment : une personne avec un coeur et une vie (la ligne de la vie et la ligne du coeur dessinées en rouge) »

P. Pelchat

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We are not hares (Nous ne sommes pas des lièvres)

Peter Pelchat, 2002
Médias mixtes/collage sur papier, 25 x 45″

Cette oeuvre parle aussi d’identité. En tant que Cris aujourd’hui, il est difficile de vivre normalement parce que nous sommes perçus comme étant différents et même « exotiques » aux yeux des non-autochtones. En plus avec la crise d’Oka et d’autres événements malheureux, nous sommes perçus comme des faiseurs d’embrouilles et comme des gens gâtés. Des fois je pense que nous sommes comme des lièvres qui se dirigent droit dans des pièges ou des collets qui vont nous étouffer à mort. Hydro Québec veut constamment des bouts de notre territoire et veut y construire des terrains de golfe en plus. Nous sommes pris au piège en tant que peuple parce qu’on ne nous laisse jamais en paix.

We are not hares

« Il s’agit d’un avertissement à notre peuple de ne pas se laisser leurrer par ce que l’homme blanc nous offre sans répit pour un morceau de notre terre précieuse ; la terre dont nous avons besoin pour survivre tels que nous sommes actuellement : forts, fiers et libres, en exploitant la terre uniquement pour la survie et sans la détruire. Malheureusement, nous avons cédé une partie de nos terres pour des fonds dont on avait fortement besoin. Le collet du lièvre représente les offres des gouvernements, du Québec et les autres, en échange de nos terres. Et malheureusement, tout comme le lièvre, nous nous laissons prendre au piège et en payons le prix (perte de nos terres, toxicomanies, etc.) Le tableau démontre qu’on pourra dépasser la barrière de bois si nous empruntons un autre trajet; en d’autres mots, qu’on pourra trouver d’autres moyens de survivre, sans céder d’autres terres précieuses pour de l’argent. »

P. Pelchat

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Woman napping (Femme faisant une sieste)

Peter Pelchat, 2006
Acrylique sur toile, 24 x 30″

Cette oeuvre parle des préoccupations des femmes telles que le féminisme, les combats, le pouvoir, la fertilité et la perte de fertilité. Les interprétations de cette oeuvre sont nombreuses, cela dépend comment on s’explique la présence d’un marteau à côté de la femme endormie.

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Family Reliquary

Peter Pelchat, 2005
Livre d’artiste Assemblage, broderie sur peau fumée de caribou, aquarelle et collage sur papier

Cette image provient d’un livre d’artiste que j’ai produit en 2005. Les images qui le composent parlent des personnes qui ont eu une influence dans ma vie d’artiste. C’est un hommage à ces personnes, sept d’entre elles me sont très chères.

Ce projet de livre d’artiste me tenait à coeur. Sa réalisation m’a permis de faire un retour dans le passé et de raviver le souvenir d’êtres chers depuis longtemps disparus. Elle m’a apporté beaucoup de joie mais, parfois aussi, des moments d’exaspération. L’ouvrage est en fait un album de photos de ma famille crie composée, entre autres, d’artisans et d’artistes qui, au fil des années, ont contribué à l’art autochtone. Il reflète la culture crie tant du point de vue des thèmes traités que des matériaux utilisés. Les thèmes m’ont été absolument indispensables. J’ai voulu souligner l’importance de la famille, du lien qui unit ses membres et qui la renforce. Puisque ma famille compte un grand nombre d’artistes, j’ai voulu exprimer cet intérêt que nous partageons. Ce désir de créer des objets beaux et pratiques m’a toujours inspiré comme artiste, et mon respect pour ces gens-là se nourrit à la fois de nos liens biologiques et de leur talent artistique.

Chaque page du livre comporte en toile de fond une image de pantoufles autochtones ou de raquettes, renforçant ainsi le message de la page en question. Beaux et pratiques, ces objets constituent de puissants symboles d’identité et de culture autochtones. L’habillement autochtone — les mocassins, les pantoufles, les gants et les mitaines, entre autres — est reconnu pour ses couleurs éclatantes et ses minutieuses coutures de perles. Il m’a donc paru normal de me servir de ces objets en toiles de fond.

Les matériaux utilisés pour cet ouvrage sont pour la plupart tirés de la vie quotidienne des Cris, à savoir des peaux de caribou et d’orignal — « textiles » pour nos habits ; des piquants de porc-épic, animal constituant une source de nourriture pour nous ; des perles et du fil — matériel de décoration vestimentaire ; de la stéatite ou pierre à savon — utilisée pour la sculpture; des tissus de toutes sortes. Tous ces objets, qui reflètent notre identité en tant que peuple, sont des symboles de ce qui nous rend uniques au monde. Le livre présente un mélange de motifs de l’artisanat autochtone traditionnel et de l’art contemporain occidental à la façon de grands artistes tels que Jane Ash Poitras, Carl Beam et Robert Rauschenberg. Porteuses de messages à la fois forts et subtils, leurs oeuvres ont constitué ma source constante d’inspiration pendant l’élaboration de cet ouvrage.

Grâce à ce projet, j’ai pu revisiter l’artisanat autochtone, retrouver des membres de ma famille après de longues années de silence et faire revivre le souvenir des êtres chers disparus. Mais, surtout, tant d’émotions m’ont permis de mesurer toute l’importance d’avoir une famille.

Peter Pelchat

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Family Reliquary

Peter Pelchat, 2005
Livre d’artiste Assemblage, broderie sur peau fumée de caribou, aquarelle et collage sur papier

Cette image provient d’un livre d’artiste que j’ai produit en 2005. Les images qui le composent parlent des personnes qui ont eu une influence dans ma vie d’artiste. C’est un hommage à ces personnes, sept d’entre elles me sont très chères.

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Family Reliquary

Peter Pelchat, 2005
Livre d’artiste Assemblage, broderie sur peau fumée de caribou, aquarelle et collage sur papier

Cette image provient d’un livre d’artiste que j’ai produit en 2005. Les images qui le composent parlent des personnes qui ont eu une influence dans ma vie d’artiste. C’est un hommage à ces personnes, sept d’entre elles me sont très chères.